Catégoriser les personnes, les actions, les langues : approches linguistiques, perspectives critiques

Résumé :

La catégorisation est un des modes d’appréhension du monde les plus puissants qui existent. Que ce soit du côté des locutrices et des locuteurs que chez les chercheur.es en sciences sociales, les activités de catégorisation sont omniprésentes au cours de nos activités quotidiennes. Elles organisent notre vie en société, le vivre ensemble, et orientent le travail scientifique des linguistes notamment lorsqu’iels décrivent les langues et les locuteurices qui les parlent ou lorsqu’iels analysent les faits de langue et les pratiques langagières par et dans lesquelles on perçoit et on catégorise le monde.  

Relevant de la philosophie aristotélicienne et kantienne, la catégorisation a été abordée dans ce cadre en tant que prédication d’un sujet et forme logique du jugement. La catégorisation a intéressé également la sociologie et l’anthropologie avec les travaux de Durkheim, de Mauss et de Bourdieu qui l’ont saisie en tant que principe de classification et de division en posant ainsi les bases sociales et non seulement cognitives et représentationnelle de la catégorisation. Les sciences du langage par le biais de la logique et de la sémantique lexicale l’ont abordée également comme un principe fondamental de l’organisation du lexique, taxinomique (X est un type de Y) et méronymique (X est une partie de Y) tout en proposant avec les travaux notamment de Kleiber et de Lakoff une vision de la catégorisation comme étant structuré moins par le partage d’un nombre de traits nécessaires et suffisants (une tradition héritée par la philosophie aristotélicienne) que par la distance avec un prototype censé organiser la composition les éléments constitutifs la catégorie. D’une conception représentationnelle, nous sommes ainsi passé à une vision beaucoup plus fluide dans laquelle la catégorisation se fait davantage dans une vision wittgensteinienne par des ressemblances de famille permettant de construire des liens entre membres d’une catégorie. Depuis de nombreuses années, les sciences sociales du langage ont abordé la catégorisation comme un travail des membres au sein d’une approche praxéologique et expérientielle. Dans ce cadre, les catégories sont davantage étudiées comme des ressources pour l’action, incarnées dans des configurations multimodales, situées des patterns interactionnels et des genres discursifs spécifiques, imbriquées dans des rapports de pouvoir.  L’objectif de la journée d’étude sera de présenter les avancées récentes au sein de cette perspective avec des présentations se situant au sein d’une palette large des sciences sociales du langage :  sociolinguistique, didactique et socio-phonétique, analyse de conversation et anthropologie linguistique, sémiotique et analyse du discours.  La journée sera structurée autour de 3 axes de recherche : catégorisation et pratiques langagières, catégorisation, action et discours politico-médiatique, catégorisation et genres. La journée sera clôturée par une intervention de Sophie Bailly, en tant que discutante, et par un retour des autres participant.es sur les perspectives de recherche futures.

Programme : 

10 H 00 - Accueil des participant·es

10 H 30 - Présentation de la journée et introduction
Luca Greco, Université de Lorraine, Crem

Axe 1. Catégorisation et pratiques langagières

11 H 00 - « On est assez esprit startup » : pratiques langagières et catégorisations socio-professionnelles dans une entreprise multilingue
Adam Wilson, Université de Lorraine, Idea

11 H 40 - Pause

11 H 50 - L’accent (im)pensé au travail : dimension maïeutique de l’entretien compréhensif
Gregory Miras, Université de Lorraine, CNRS, Atilf
Laurence Vignes, Université de Rouen Normandie, Dylis

12 H 30 - Pause déjeuner

Axe 2 - Catégorisation, action et discours politico-médiatique

14 H 00 - Partition et catégorisation au sein des groupes humains : quelles concordances ?
Michelle Lecolle, Université Sorbonne nouvelle, Clesthia

14 H 40 - Les effets de la description - Étude des procédures de qualification des actions des acteurs sur scène
Maud Verdier, Université Paul Valéry de Montpellier, Praxiling

15 H 20 - Pause

Axe 2 - Catégorisation et genres

15 H 30 - La honte a-t-elle un genre dans les témoignages numériques des alcooliques ?
Driss Ablali & Brigitte Wiederspiel, Université de Lorraine, Crem

16 H 10 - Catégorisations et recatégorisations dans des récits de violences sexistes et sexuelles
Aron Arnold, Université Paris Cité, CNRS, LLF

16 H 50 - Pause

17 H 00 - Bilan et conclusion
Sophie Bailly, Université de Lorraine, CNRS, Atilf